Harcèlement – les membres de CODIR aussi

Le harcèlement moral infligé ou subi par les membres de CODIR peut être combattu efficacement, pourvu que les personnes concernées se fassent correctement accompagner.

Les conflits avec un membre de comité de direction sont normaux. Ce qui l’est moins c’est quand ses collègues ou ses collaborateurs se sentent « poussés à bout » ou qu’ils évoquent un harcèlement moral, sexuel ou des comportements hostiles. Cela arrive assez fréquemment. Or il est possible et nécessaire d’y faire face. … et c’est beaucoup plus facile avec un tiers extérieur.

Les dirigeants que nous accompagnons utilisent rarement le terme « harcèlement ». Ils se méfient à juste titre d’un mot qui renvoie à un motif de contentieux. Ce sont souvent leurs collaborateurs qui leur ont tendu ce mot. Il est vrai qu’un cadre peut être très dysfonctionnel. Parfois il est lui même harcelé. C’est en tout cas une situation conflictuelle non traitée qui conduit à une escalade dans le conflit. Trop souvent, les dirigeants attendent les arrêts maladie et les mises en garde de la médecine du travail pour réagir. Ils se sentent souvent démunis ou fantasment des solutions radicales. Les démarches de prévention habituelles leur semblent souvent trop générales, surtout lorsque les dirigeants cherchent quoi faire dans un cas bien précis.

Or il existe une méthodologie robuste et simple, inspirée de l’approche et la transformation constructives des conflits qui permet aux dirigeants de définir et mette en oeuvre des réponses structurées et décisives.

 

Face au harcèlement, sortir du déni

C’est le premier pas qui coûte. Après des années à des postes de directions, il est en effet très dur d’admettre que l’on est victime d’un harcèlement, que ses collaborateurs le sont ou que l’on se retrouve soi-même en situation de harceleur.  Et là, encore plus qu’ailleurs, il ne faut pas rester seul avec ces questionnements. Ne serait-ce que parce qu’un entretien avec un professionnel coûtera bien moins cher que les coûts liés à l’absentéisme, aux départs non voulus ou aux procédures juridiques. Cela devient un réflexe dans les entreprises engagées sur des programmes de réduction du harcèlement.

Moins de la moitié des réorganisations réussissent

Une DRH  : « au début je me disais « on va régler ça discrètement en interne ».  En fait, il faut être honnête, harcèlement moral ou pas, on a laissé pourrir plein de situations.

Maintenant c’est très clair, dès que je perçois qu’une situation est durablement dégradée, je propose à la personne un entretien avec un tiers qui sache faire la part des choses. Et même mon DG s’y met !

Un premier entretien de clarification, grâce à un questionnement structuré, permet de prendre du recul. Il s’agit d’abord de factualiser la situation et d’en démêler les implications émotionnelles. Il aide ensuite à distinguer le normal (un coup de pression) de l’anormal (une maltraitance qui s’installe). Le dirigeant repère enfin ce qu’il est possible de faire à son niveau pour (se) protéger et agir efficacement. Ici ce qui compte ce n’est pas d’avoir un « psy au bout du fil ». C’est de développer un leadership véritable.

Hélas, plus les personnes vont mal, plus elles ont l’impression de pouvoir se passer d’aide. Or cette première étape qui consiste à accepter d’échanger avec un intervenant extérieur qualifié et tenu à la confidentialité est essentielle.

 

L’épaisseur du papier à cigarette

La capacité de leadership, la détermination à obtenir des résultats par tous les moyens sont de plus en plus valorisés. Cela est particulièrement vrai dans des contextes de marchés matures avec une focalisation forte sur la réduction des coûts. Ça l’est aussi dans les secteurs avec des disruptions majeures liées au digital, où la vitesse d’exécution est vitale. Il apparaît alors normal pour un dirigeant de « pousser » ses collaborateurs aussi loin que possible. Et à ce niveau hiérarchique, il va de soi que la performance prime sur toute autre considération.

Or il existe une différence très mince entre la nécessaire capacité à confronter au nom des objectifs  et la tendance à être harceleur ou violent en raison de la difficulté à gérer sa propre pression liées à ces objectifs. Et c’est toujours au nom de la première que l’on justifie la seconde.

L'épaisseur d'un papier à cigarette

Je vais vous dire, j’en ai connu des Présidents. Et je ne suis pas un tendre non plus. Mais il a fallu cet accident [cardiaque] pour que je réalise que ce que j’acceptais que l’on me fasse vivre était juste dingue.
Et maintenant je fais votre pub. Je dis que tous les directeurs devraient régulièrement faire leur contrôle technique « Est-ce que ce que je subis ou fais subir est normal dans un milieu professionnel ? Et si non, quel moyen je me donne pour arrêter ça ? »

 

Sortir par le haut d’une approche binaire

La plupart des dirigeants qui subissent ou font subir une pression « inappropriée »  décrivent une logique binaire : « soit je tiens, soit je saute ». « Je tiens, et le jour où j’en aurais marre, je pars ». « C’est moi ou l’autre ». « C’est entièrement de la faute de l’autre ». etc. Or le premier intérêt d’un accompagnement est de permettre de sortir de ces représentations qui empêchent toute solution positive.  C’est seulement à cette condition qu’il est possible de transformer  véritablement une situation invivable. Plutôt que « flinguer » la partie adverse ou « se flinguer » soi-même, il est possible de décider de stratégies constructives.

Harcèlement les bruits de couloir

J’en voulais à mon DG de vouloir tout faire tout seul et de tout contrôler. Mais je faisais exactement la même chose en mettant un point d’honneur à m’en sortir seul.
Hé oui, ce qui est infantile ce n’est pas de solliciter une expertise extérieure. C’est de ne pas dormir depuis 6 mois et de croire que l’on va pouvoir arrêter ça uniquement en serrant les dents.

 

Oser se faire accompagner

L’accompagnement d’un dirigeant harcelé ou harceleur diffère à la fois d’un accompagnement psychologique et d’un coaching classique. Un psychologue aidera à comprendre ce que cette situation réveille en soi. Un coaching individualisé va permettre de définir des objectifs et de les atteindre.

Un accompagnement en Approche et Transformation Constructive des Conflits (A.T.C.C.) permettra par contre de repérer ce qui « consent » à la position de victime ou d’agresseur. Ce travail se fait au niveau relationnel et organisationnel. Cette approche aboutit en effet souvent à des échanges avec les autres parties prenantes. L’objectif est alors de restaurer en interne à tous les niveaux, la capacité à assumer ses responsabilités concernant les règles de respect élémentaires au travail et des manières acceptables de réguler le chaos.

Cesser de croire que l’on peut s’en sortir tout seul. Objectiver ce qui se passe. Comprendre ce qui est en jeu. Acquérir les bases de la transformation des conflits. Evaluer les options possibles. Préparer et conduire des entretiens. Mettre ensuite en place de façon « puissante » des logiques de travail, y compris avec ses N+1 et N-1 qui renforcent votre autorité et réduisent l’autoritarisme ambiant. Mettre enfin un terme à des comportements qui n’auraient pas du être acceptés dès le début…

Et peut être reconnaître, si l’on y a consacré le temps et l’accompagnement nécessaire,  qu’il est possible de ressortir grandi d’une telle épreuve.